Que ceux qui ne connaissent et n’espèrent rien
au delà de cette vie misérable y soient attachés,
c’est un effet naturel
de leur amour-propre.
Mais que des Chrétiens à qui Dieu a fait des promesses
si grandes
et si précieuses
pour la vie future,
comme parle saint Pierre ;
à qui sont ouvertes les voies à une vie nouvelle :
mais que des Chrétiens qui doivent regarder ce monde
comme un lieu d’exil,
de misère
et de tentation,
manquent de courage
pour se détacher des amusements de leur pèlerinage,
et pour soupirer
après les biens immenses de leur Patrie,
c’est une bassesse d’âme
qui dément
et qui déshonore leur Foi.
Quoi ! des hommes destinés à jouir avec Jésus-Christ d’une gloire
et d’une félicité éternelles
ne se laisseront jamais toucher
par tant de grandeurs qui leur seront préparées !
Abrutis,
stupides,
ensevelis dans l’amour des choses sensibles,
ils feront leur capital des biens grossiers,
fragiles,
imaginaires de cette vie ;
et le paradis
ne sera que leur pis-aller !
Quoi ! ce ne sera que dans l’extrémité d’une maladie incurable
qu’ils voudront bien accepter,
faute de mieux,
le royaume du Ciel,
parce qu’ils sentiront alors
que tout ce qui les amusait sur la terre
leur échappe pour jamais !
Est-ce ainsi donc,
que nous demandons chaque jour à Dieu notre Père
l’avènement de Son règne,
que nous craignons néanmoins,
et que nous voulons toujours
différer ?
(Mgr Fénelon)